21 mai 2014

Salon RVF : un tour en Champagne



Le weekend dernier, je me suis rendue à l'édition 2014 du Salon de la Revue du Vin de France, qui se tenait dans le cadre somptueux du Palais Brongniart.
Cette fois-ci encore, et au vu des nombreux vignerons et des nombreuses Maisons représentées, je me suis surtout attardée sur les stands dédiés au champagne ! Voici donc un panorama des rencontres et des précieux liquides qui m'ont marquée.




Dès mon arrivée, je me suis dirigée vers le stand dédié à la Maison Louis Roederer, me disant qu'une occasion de déguster ces champagnes ne se produirait pas tous les jours. Etrangement, j'ai d'abord été déçue, ou plutôt non-impressionnée. Don't believe the hype, n'est-ce pas ? Et finalement, je suis retournée les goûter lors de ma deuxième visite, le samedi. A ce moment-là, il m'a bien fallu me rendre à l'évidence : ce sont évidemment de très beaux champagnes. Peut-être que ma première dégustation a souffert du manque d'éléments de comparaison immédiats. Dans tous les cas, je suis contente d'avoir été capable d'apprécier ces champagnes à leur juste valeur - même si d'aucuns diront que les noms prestigieux ne sont pas toujours synonymes d'une qualité hors norme. 

J'ai donc pu déguster 5 de leurs cuvées, y compris le Cristal 2006, une cuvée rare qui porte bien son nom, avec sa robe pâle et cristalline. Cette cuvée existe depuis 1876 : c'est le Tsar Alexandre II qui en fit la demande, et c'est lui encore qui décida que les bouteilles seraient transparentes et à fond plat, tandis que la majorité des bouteilles de l'époque étaient vertes.
Composé à 60% de pinot noir et à 40% de chardonnay, le vin est issu de raisins cultivés pour 60% d'entre eux en biodynamie, et ce depuis 2006. J'ai été charmée par ses arômes, son côté vif et minéral, et cet équilibre parfait entre maturité et fraîcheur, même s'il est évident qu'il n'a pas encore dit son dernier mot !




Ensuite, direction Drappier, une Maison dont je n'avais, là aussi, jamais dégusté les vins. Ici, trois cuvées m'ont particulièrement plu.
- Brut Nature sans soufre (100% pinot noir) : un très joli vin aux bulles fines et délicates, à la fois vif et puissant, et plein de caractère - davantage d'ailleurs à mon sens que leur Brut Nature classique. 
- La cuvée La Grande Sendrée 2006 (55% de pinot noir pour 45% de chardonnay) : Pour la petite anecdote, elle tient son nom d'une parcelle qui fut ravagée par un incendie, et donc recouverte de cendres. Pourquoi un "S" à Sendrée ? Tout simplement parce qu'une faute d'orthographe a été faite sur le cadastre de l'époque ! Issue de raisins qui poussent sur une parcelle d'exception, cette cuvée donne un champagne très vineux, doté d'une belle persistance aromatique et qui s'appréciera surtout à table.
- Carte d'Or 1995 : le clou du spectacle, servi en magnum (seulement 5 000 bouteilles de ce format ont été produites). Une véritable merveille, 100% pinot noir, extrêmement puissant tout en évitant l'écueil de la lourdeur. Grande réussite !




Pour continuer, je suis partie à la découverte de la Maison Bollinger - celle dont les bouteilles sont si souvent présentes dans la série Absolutely Fabulous. Apparemment ce n'est qu'une coïncidence, mais ce champagne est surtout connu et consommé de l'autre côté de la Manche. 
Nous avons débuté par la Special Cuvée, qui a la particularité d'être élaborée à partir de vins de réserve qui sont, pour une partie, conservés en cave en format magnum sous légère prise de mousse avant d'être assemblés. Une technique peu courante et qui fait ses preuves, puisque le vin démontre un caractère certain. 
Lors de cette dégustation, c'est surtout la  cuvée La Grande Année 2004 qui m'a séduite, un vin charmant, fin tout en étant bien présent en bouche. La fermentation s'étant déroulée entièrement en fût, certains aspects caractéristiques se font sentir, notamment des arômes grillés auxquels j'ai du mal à résister.




On poursuit la visite chez Jacquesson, une Maison fondée en 1798 et dont le signe distinctif est que les différents cuvées de son brut non millésimé sont numérotées et correspondent à l'année dont les vins servent de base pour la cuvée en question. Ainsi, la cuvée 737, assemblée sur une base de 2009, donne un très joli champagne, racé et précis sans être trop complexe, idéal pour l'apéritif.

La cuvée Dizy - Terres Rouges (100% pinot noir), qui elle ne porte non pas un numéro mais le nom d'un lieu-dit, m'a étonnée par sa couleur étonnamment soutenue en comparaison avec les autres champagnes rosés que j'avais pu déguster jusqu'à présent. On se rapproche presque de la robe d'un vin rouge ! Quant à mon coup de coeur, il s'agit de la cuvée 733, issue principalement de raisins vendangés en 2005 ainsi que de vins de réserve de 2004 et 2001. Le résultat est très rond, équilibré tout en étant assez opulent en bouche, avec un côté gras qui m'a beaucoup plu, tout en étant contrebalancé par une grande fraîcheur. Ici aussi, quel vin !





La suite de ma visite s'est déroulée chez Brimoncourt, une Maison atypique puisqu'elle a été créée en 2009 par Alexandre Cornot et Arnaud Dupuis-Testenoire, qui ont eu l'idée de ne partir de rien pour monter une Maison de champagne. Un projet audacieux, surtout quand on évolue sur un marché trusté par des marques qui existent depuis plusieurs siècles !
Leurs cuvées se veulent "une réponse sophistiquée à la convenance et l'ennui", et j'ai été ravie de pouvoir les goûter à nouveau, après une première fois au Grand Tasting l'hiver dernier. Résultat des courses, leur Blanc de Blancs est mon favori ! Un vin harmonieux, très vif tout en conservant ce qu'il faut de rondeur, et blindé d'arômes d'agrumes très agréables. C'est ce type de cuvées qui confirment mon attirance pour le chardonnay, et pour les champagnes peu ou non dosés (celui-ci l'est peu, et ce afin de ne pas gommer les caractéristiques que le terroir donne au vin).




De Piper-Heidsieck, je connaissais peu de choses - il me semble avoir déjà essayé leur brut sans année lors d'événements, mais c'était tout. Au final, je ne regrette pas une seule seconde de m'être attardée sur leur stand, et ce pour une unique raison : leur cuvée Rare 2002. Commençons par la bouteille, d'un noir plutôt opaque, qui est ornée d'une "étiquette" dorée en relief, collée à la main sur chacune des bouteilles, et dont les motifs évoquent les feuilles de vignes. Plus haut, une bague dorée qui rappelle les stop-gouttes ajoute un détail supplémentaire qui annonce la couleur : ceci est un vin d'exception. D'ailleurs, j'ai trouvé la bouteille tellement jolie que j'ai pu l'emmener avec moi, vide certes, mais tout de même !
Et le vin, me direz-vous ? 2002 ayant été une très grande année en champagne, ce millésime prend tout son sens. Composé à 70% de chardonnay et 30% de pinot noir, le vin est ample, agréable à boire, profond et terriblement charmeur - un gros gros coup de coeur, malgré un dosage plus élevé que celui des champagnes que j'apprécie habituellement (10-12 grammes).




Enfin, et pour terminer en apothéose, j'ai découvert lors du salon les champagnes Dom Caudron, et je ne me remettrai pas de si tôt de leur cuvée Millésimée 2006. Dom Caudron, c'est le nom des vins produits par la coopérative du petit village de Passy-Grigny, situé dans la Vallée de la Marne. On entend souvent du mal des vins de coopérative, mais en l'occurrence, difficile de trouver quoi redire aux vins que j'ai dégustés !
La particularité de la Maison est qu'elle donne au meunier le rôle principal - ce cépage emblématique de la champagne est pourtant rarement mis en exergue de la sorte, et il fait souvent office de "troisième" roue du carrosse aux côtés du chardonnay et du pinot noir. J'ai donc trouvé cette dégustation très intéressante, puisqu'elle m'a permis de mieux saisir ses caractéristiques grâce à plusieurs cuvées mono-cépages.
J'ai pu goûter leur Brut (100% meunier), la cuvée Vieilles Vignes (100% meunier aussi), la cuvée Cornalyne en rosé mais aussi et surtout, donc, leur Millésimée 2006 (50% meunier / 50% chardonnay, vieillis en fût de chêne).
Au nez déjà, j'étais séduite, et la bouche ne m'a pas déçue, loin de là. Un champagne à se damner, complexe, riche, puissant, généreux et audacieux, avec des arômes beurrés que j'aime par dessus tout. On a envie que cela ne s'arrête jamais ! Et comme si cela ne suffisait pas, j'ai découvert que je n'étais pas encore au bout de mes surprises lorsque l'on m'a annoncé le prix de cette bouteille : 34,90€, soit un rapport qualité-prix tout à fait imbattable selon moi, tellement ce vin correspond à mes goûts du moment. Le graal, en somme !

11 mai 2014

Guide de survie en salon de dégustation




Le weekend prochain aura lieu à Paris l'édition 2014 du salon du vin de la Revue du Vin de France, qui réunira pas moins de 250 exposants, français mais aussi étrangers, dans l'enceinte du Palais Brongniart (M° Bourse - 75002).

Les salons de dégustation, comme celui des Vignerons Indépendants qui se tient deux fois par an, le Grand Tasting de décembre ou encore le Salon Rue98 des vins qui s'est tenu tout récemment, ce sont des centaines d'exposants, des milliers de vins à goûter... Et peu de temps pour y arriver ! Cela a de quoi faire tourner la tête, à juste titre d'ailleurs. Voici donc quelques conseils tirés d'expériences personnelles et de mes diverses lectures pour apprécier au mieux ces grands rendez-vous de dégustation, et les quitter dans les meilleures dispositions.




AVANT

1. Préparer sa visite

Avant toute chose, il est bon de jeter un oeil à la liste des exposants. Cela permet évidemment de ne pas manquer la venue du vigneron dont on apprécie les vins et dont on souhaite découvrir d'autres cuvées, de celui dont on a entendu parler et que l'on veut rencontrer, ou même de se renseigner sur les régions viticoles représentées afin de savoir à quoi s'attendre une fois arrivé.
Evidemment, si vous êtes plus néophyte, vous pouvez prévoir le parcours de votre visite en suivant les conseils d'experts qui réalisent souvent des sélections en amont des principaux salons. Jetez un oeil sur Google ou même sur Twitter pour les trouver !

2. Le jour J

Le jour du salon, quelques dispositions sont à prévoir. Tout d'abord, évitez de venir le ventre vide - même si la plupart des salons proposent des stands de restauration, ce serait dommage de rater la visite pour cause d'hypoglycémie. 
Deuxième conseil, laissez votre parfum trôner en paix dans le cabinet de votre salle de bain - il vaut mieux éviter les odeurs trop prégnantes pour ne pas gâcher votre propre dégustation, mais aussi celle des autres visiteurs. Le même conseil vaut pour les crèmes parfumées pour les mains (j'en ai déjà fait les frais !) dont les parfums parfois puissants peuvent facilement dissimuler les arômes des vins lorsque vous approchez votre verre de votre nez et de votre bouche.




EN ARRIVANT

3. Le parcours

On l'a vu, le nombre important de vignerons présents peut sembler intimidant lorsqu'on arrive sur les lieux du salon. Par où commencer ? Comment faire des choix ? Cela dépend évidemment d'abord du temps dont vous disposez, mais aussi d'un paramètre plus difficile à évaluer : le temps passé sur chacun des stands.
Si le temps vous est compté, vous pouvez choisir de vous limiter à une seule région viticole, surtout lorsqu'il s'agit de grands salons. Vous pouvez prendre votre décision selon vos goûts ou selon vos connaissances, et choisir ainsi de perfectionner votre maitrise des vins d'une région ou d'en découvrir une nouvelle. Pour ma part, je privilégie souvent les champagnes, à la fois par goût et parce que qui dit appellation prestigieuse, dit souvent prix qui ne permettent pas d'en consommer aussi souvent que l'on le souhaiterait. Cependant, n'hésitez pas à faire confiance à votre feeling, et à vaquer au gré des stands - de jolies surprises pourraient bien vous attendre !

4. Le rouge, le blanc, l'effervescent...

Un autre point à prendre en compte lorsqu'on se rend à un salon est le suivant : lorsqu'on déguste un grand nombre de vins, le palais se fatigue vite et l'on risque rapidement de passer à côté des vins dégustés. Ainsi, il est mieux de respecter l'ordre "logique" des choses : d'abord les effervescents, puis les vins blancs et les rosés, suivis des rouges et enfin des liquoreux. 
Toutefois, dans les faits, lorsqu'on est face à un vigneron sympathique et désireux de faire partager l'ensemble de ses cuvées, il arrive bien sûr qu'on déroge à cette règle.




EN DEGUSTANT

5. Cracher

Eh oui, ce n'est pas la règle la plus fun de prime abord, mais c'est un fait : il vous sera impossible de tout avaler - sous peine de revenir avec une bouteille (dans le meilleur des cas !) d'un vin mauvais ou pas à votre goût que vous aurez acheté en pensant faire l'affaire du siècle, les papilles et vos 5 sens endoloris par tant de vin. Pas d'inquiétude, cela ne signifie pas qu'il vous faudra tout recracher ! Certains vins vous plairont tant que vous ne voudrez pas en manquer une goutte, et c'est tant mieux !

6. Passer du temps sur un même stand

Lorsque vous vous approchez d'un stand et que le vigneron vous sert un premier verre, il y a fort à parier qu'il s'agira du vin le moins cher parmi ses cuvées. Cela ne veut pas dire qu'il sera mauvais, mais simplement que les suivants risquent de beaucoup vous plaire si vous avez apprécié le premier. Ainsi, ne faites pas l'erreur de passer 10 secondes sur chaque stand, en tendant votre verre avant de partir dès la première gorgée avalée vers le stand suivant. Au contraire, prenez le temps d'apprécier la première cuvée, et laissez vous guider par le vigneron qui vous présentera celles qui suivent. Ainsi, pour prendre l'exemple d'un vigneron champenois, il y a fort à parier qu'il commencera par vous servir son brut sans année (non millésimé, donc), et que la dégustation s'achèvera par une cuvée millésimée - plus rare et moins accessible financièrement, donc intéressante à goûter ne serait-ce qu'une seule fois.

7. Optimiser le temps passé

Si vous savez d'avance que vous ne passerez que quelques minutes sur un stand, le mieux est encore de l'indiquer au vigneron dès votre arrivée. Il n'est ainsi pas rare d'entendre les amateurs qui se pressent sur les stands annoncer : "je souhaite goûter un seul blanc", ou encore "seulement des rouges". Dans le premier cas, le vigneron sortira probablement sa meilleure cuvée. Dans le second, cela vous évitera de devoir refuser le verre de blanc qu'il allait vous proposer.

8. Après avoir dégusté

Si un vin vous plait, pensez à prendre des notes ou, pour faire plus simple, à photographier l'étiquette du vin en question grâce à votre smartphone. Si le vin vous plait mais que vous ne souhaitez (ou ne pouvez, puisque certains salons ne proposent pas de vins à la vente) pas l'acheter, renseignez-vous sur les points de vente dans lesquels il est disponible. 
N'oubliez évidemment pas de remercier le vigneron, surtout quand il a pris le temps de vous en dire plus sur son travail et sur ses vins ! Vous pouvez aussi lui demander s'il a d'autres stands à vous recommander, ce qui vous permettra sûrement de réaliser d'autres découvertes.

Vous voilà fin prêt pour profiter au maximum des prochains salons de dégustation !

Billet illustré d'une partie des vins que j'ai particulièrement appréciés lors du salon Rue89 des Vins, "Sous les pavés, la vigne", dont je vous avais parlé ici